Communes de Chantecorps et
Fomperron, Canton de Ménigoute
Département des Deux-Sèvres
L’église abbatiale des Châtelliers,
située comme il se doit sur le côté nord du monastère, mesurait environ 65
mètres de long, de son porche occidental à son grand chevet plat oriental (large
de 25 mètres). De la première église consacrée en 1156, il semble que la
reconstruction des années 1249-1277 n’ait conservé que la nef et le transept.
L’embellissement et l’agrandissement, menés par le 7e abbé, Thomas,
ont alors concerné le porche et le chœur. Le premier fut pour l’accueil des
pèlerins, le second pour une mise en scène solennelle du tombeau de Giraud de
Salles.
Le portail occidental en
ruines : la porte des années 1680 est incluse dans la grande arcade
gothique du XIIIème siècle, entre deux puissants contreforts. Destruction en
1906-1908.
Dessin de G. Girault, vers 1890. Coll. Ph. Michaud
Lors de ces travaux
considérables, réalisant un grand chœur gothique à arcs-boutants (cf. essai de
reconstitution de Mme Andrault-Schmitt en 2004 (bibliographie)), l’ensemble du
sol de l’abbatiale fut orné de carrelages en terre vernissée, à décors
incrustés. De tels sols étaient alors assez fréquents, tant pour les édifices
religieux que civils. Il est possible que ces carreaux aient été réalisés non
loin, au hameau « La Tuilerie ». La superficie recouverte par ces carreaux fut considérable,
puisqu’elle peut être estimée à 1500 mètres carrés.
L’église fut gravement
endommagée en 1346 et 1413 par les Anglais, lors de la Guerre de Cent Ans. Le
tombeau de Giraud de Salles fut profané et disparut, et il fallut refaire en
partie le carrelage, plus simplement. En 1568, lors des Guerres de religion,
l’incendie général du monastère fut tellement violent que les voûtes de
l’abbatiale s’effondrèrent et elle resta abandonnée pendant plus d’un siècle.
Cliché
anonyme, vers 1895, coll. Ph. Michaud
Une rénovation générale la
rendit au culte après une nouvelle consécration le 7 octobre 1685. Ces travaux
concernèrent les voûtes (refaites en bois) et conservèrent les murs médiévaux
en réduisant la dimension des baies. Un nouveau dallage, à damier noir et
blanc, fut établi un mètre au-dessus du niveau initial, masquant la base des
colonnes.
Un bel ensemble de boiseries
de chêne garnit le chœur. Elles furent souvent comparées à celles de
l’abbatiale bénédictine de Saint-Maixent. Mgr Barbier de Montault en retrouva
quelques beaux éléments, dispersés dans les greniers de l’aile Ouest. Vendus
lors des enchères de 1905, ils n’ont pas encore été localisés. Il est possible
que le grand Christ en croix aujourd’hui dans le chœur de Saint-André de Niort
provienne de ce décor ambitieux, réalisé par le sculpteur poitevin Jean
Sauvage. Quatre stalles furent localisées en 1892 par Mgr Barbier de Montault
en l’église paroissiale de Fomperron. Elles furent semble-t-il en partie
détruites vers 1950, mais l’une d’entre elles existe encore aujourd’hui en une
collection privée de Saint-Maixent.
Christ du
XVIIème siècle (croix moderne), Niort, église Saint-André, Cl.
Ph. Michaud 2007
Une des deux cloches bénies à
la suite de ce remaniement du XVIIème siècle est localisée. Elle est dans
l’église de Sainte-Néomaye (Deux-Sèvres) et porte l’inscription «+IESU MARIA JOSEPH LABBAYE DES CHASTELLIERS
1697/NICOLAS AUBRY FOND ». Elle fut classée
Monument Historique le 26/02/1943.
Les
ruines du chœur (XIIIème siècle), face Nord, hautes d’environ 14 mètres, telles
qu’elles furent jusque vers 1906, date de leur destruction ; le contrefort
de gauche (Est) était intégré au chevet, perpendiculaire.
Cliché anonyme,
vers 1895, coll. Ph.
Michaud
Les colonnes étant enterrées
de plus d’un mètre, les élégantes arcades paraissent trop trapues. Les fenêtres
hautes, consécutives aux travaux du XVIIème siècle, sont très réduites par
rapport aux baies gothiques.
Cliché Jules Robuchon, 1889, coll. Ph. Michaud
Vue inédite de la même ruine,
face Nord, d’Ouest en Est ; l’arrachement de la quatrième et dernière
travée du chœur se voit parfaitement.
Cliché anonyme,
vers 1900, coll. Ph.
Michaud
Face Sud ; la toiture du
bas-côté allait jusqu’à la corniche de la base des fenêtres hautes ;
l’arrachement des poutres de la charpente est visible.
Cliché
Blauchon, vers 1900, coll.
Ph. Michaud
Même vue, sur
laquelle se distingue le remplage gothique de la fenêtre de gauche, comblé pour
la réduction vers 1685. Ce cliché inédit surpasse en qualité les précédents, et
permet de mieux apprécier cette grande ruine au début du XXème siècle.
Cliché
anonyme, vers 1900 (?), coll.
particulière
Ci-dessous, quelques
exemples de carrelages datant des années 1270 et retrouvés lors des fouilles de
l’abbatiale par Mgr Barbier de Montault et Emile Espérandieu en 1887-1889. Près
d’une centaine de carreaux différents, par leur forme ou leur décor, furent
recensés et dessinés par Emile Espérandieu. Ces modèles se retrouvent dans
toute la France, tant pour des édifices civils que religieux. Aux Châtelliers,
très peu étaient en bon état, puisqu’ils ont souffert de l’incendie de 1568 et
de la chute des voûtes ; les meilleurs furent ôtés pour des dons à une
douzaine de musées ou sociétés savantes français. Aujourd’hui plusieurs
exemplaires sont exposés ou conservés dans les réserves des musées de Niort,
Parthenay, Poitiers, Saumur (dépôt du Palais du Roure, Avignon) ou Dijon, par
exemple.
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